Les jardins de la résilience : La façon dont les femmes Gond Adivasi cultivent le changement dans un contexte de crise


Pour faire court

Dans la réserve indienne de tigres de Panna, la communauté Gond Adivasi du village d’Umravan est confrontée à une situation désastreuse. Déplacés au nom de la protection des animaux sauvages, ces peuples autochtones luttent pour conserver leur mode de vie traditionnel. Un groupe de femmes résilientes a toutefois relevé le défi.  Elles sont à l’origine d’un mouvement visant à cultiver des jardins potagers, qui apportent non seulement une sécurité alimentaire et un soutien indispensable aux patients atteints de tuberculose et de silicose, mais représentent également une solution climatique durable et équitable en matière de genre.  Leur histoire est un appel à l’action en faveur de la reconnaissance et du financement de vraies solutions climatiques équitables en matière de genre et dirigées par les communautés.

Fausse solution affectant la communauté

La communauté Gond Adivasi, nichée près de la réserve de tigres de Panna, subit une dure épreuve.  De nombreux membres de la communauté Gond Adivasi, qui vivent dans le village d’Umravan, sont contraints de quitter leur habitat à cause d’un projet de conservation des tigres, qui les accuse, à tort, de détruire la forêt et de constituer une menace pour la population de tigres. Le déplacement éventuel a été mal mis en œuvre. Les villageois n’ont pas été correctement informés. Beaucoup ont été intimidés et contraints de signer leur consentement. De plus, la reconnaissance des terres forestières pour les agriculteurs éligibles et les droits d’établissement en vertu de la loi indienne sur les droits forestiers (FRA) n’ont pas été pris en compte. Faute de ressources et de terres, de nombreux villageois ont émigré et travaillent dans des mines de diamants et de pierres des régions voisines, dans des conditions dangereuses, d’exploitation et de travail informel, ce qui a entraîné une forte augmentation des maladies respiratoires telles que la tuberculose et la silicose chez ces personnes.

Ce déplacement a non seulement dispersé la communauté, mais a également perturbé l’équilibre écologique.  Les arbres Mahua, autrefois abondants dans la région, produisent désormais moins chaque année, et les espèces invasives empiètent désormais sur les terres, altérant la biodiversité que la communauté a longtemps préservée.  La contamination due aux activités minières a atteint les cours d’eau, intensifiant les conflits entre la faune sauvage et les membres restants des communautés. Tout cela illustre la rupture de l’harmonie entre la communauté Gond Adivasi et la nature et se doit au fait qu’ils ont été déracinés de leurs terres ancestrales.

Ces bouleversements ont eu un impact disproportionné sur les femmes, qui doivent assurer, dans ces conditions difficiles, l’approvisionnement en eau et en bois de chauffage tout en s’occupant de leur famille.  Les femmes de la communauté sont les gardiennes des connaissances traditionnelles autochtones et écologiques.  Elles ont une connaissance approfondie des propriétés médicinales de diverses plantes, de l’identification et de l’utilisation des légumes sauvages, des subtilités de la conservation de l’eau, ainsi qu’une capacité innée à lire et à réagir aux conditions météorologiques, le tout couplé à des pratiques agricoles en harmonie avec ces cycles naturels. Ce savoir inestimable, transmis de génération en génération, risque de se perdre.  La séparation forcée de ces communautés autochtones de leurs terres ancestrales menace de rompre la chaîne de transmission des connaissances, mettant en péril leur contribution aux stratégies d’atténuation et d’adaptation aux effets du changement climatique pour les générations futures. Ce scénario met en évidence une triste réalité, à savoir que les efforts de conservation de l’environnement peuvent négliger les personnes mêmes qui protègent et nourrissent ces terres depuis des générations, et donc constituer de fausses solutions climatiques. 

Solutions climatiques équitables en matière de genre

En réponse à cette crise, les femmes d’Umravan se sont tournées vers une solution innovante consistant à restaurer leurs arrière-cours et les petites parcelles de terre auxquelles elles avaient encore accès, pour en faire des jardins potagers dynamiques.  Ces jardins sont plus que de simples parcelles de culture. Ils sont le reflet de l’espoir et de la résilience des femmes de la communauté Gond Adivasi. Alors que les légumes commencent à pousser, les femmes s’efforcent de cultiver ces plantes qui représentent la promesse d’une sécurité alimentaire et d’une pérennité pour leur communauté, qui se voit refuser l’accès aux terres et aux forêts qu’elle considère depuis toujours comme leurs foyers.  Pour entretenir ces jardins potagers, elles ont également développé des moteurs solaires pour irriguer directement ces potagers depuis l’eau du puits communal.  Aujourd’hui, elles n’utilisent pas seulement le surplus pour le vendre et gagner un revenu, mais elles utilisent aussi ce même potager pour fournir les aliments nutritifs dont ont tant besoin les personnes qui ont été déracinées et contraintes de vivre avec la tuberculose et la silicose. Elles réalisent tout ceci en poursuivant en même temps leurs efforts de plaidoyer auprès des autorités pour leurs droits fonciers et les encouragent à s’éloigner des fausses solutions pour se tourner vers des solutions se fondant sur la relation symbiotique des populations autochtones avec la nature et la forêt. 

Appel à l’action de la part de la communauté

Nous voulons souligner la nécessité d’un financement climatique qui soutienne notre coexistence avec la nature. Nous, les femmes, demandons un soutien qui réponde à nos besoins locaux, notamment la garantie des moyens de subsistance pour éviter la migration, ainsi qu’un accès urgent à une énergie propre pour cuisiner et répondre à nos besoins quotidiens.  Il est temps de donner la priorité aux actions qui bénéficient directement aux communautés locales et aux femmes

Dhaatri : un centre de ressources pour les femmes et les enfants

L’histoire des femmes Gond Adivasi nous appelle à réévaluer l’approche du financement climatique et de la conservation de l’environnement par les autorités. Elle souligne la nécessité de s’orienter vers des solutions véritablement inclusives et tenant compte des réalités socio-économiques des communautés vulnérables.  La communauté internationale est invitée à reconnaître et à soutenir les solutions autochtones telles que les jardins potagers d’Umravan et les solutions énergétiques alternatives décentralisées, tout en encourageant les pratiques de protection des écosystèmes conservées par les communautés, au lieu de créer des conservation-forteresses qui barre l’accès aux communautés.  Il convient donc de réorienter les ressources vers des solutions dirigées par les communautés locales, en particulier les femmes, les filles, les personnes trans, intersexes et non binaires, et de défendre leurs droits à la terre et à un environnement sain.

Qui soutient cette solution climatique équitable en matière de genre ? 

Dhaatri, un centre de ressources pour les femmes et les enfants, travaille activement avec la communauté Gond Adivasi à Panna depuis 2015.  L’accent a été mis sur l’amplification de la voix des femmes adivasis et sur le soutien à leur apporter pour qu’elles puissent faire valoir leurs droits forestiers et revendiquer leurs droits légitimes.  L’organisation collabore étroitement avec les femmes et les communautés locales afin de démontrer des approches efficaces pour restaurer les moyens de subsistance, les forêts, les pratiques de connaissance et promouvoir la sécurité alimentaire et les énergies renouvelables pour plus de justice de genre.  Par le biais d’ateliers sur le terrain et d’échanges de connaissances, Dhaatri s’efforce de doter les femmes de compétences essentielles, de leur permettre une compréhension des lois et des procédures, ainsi que de les équiper de stratégies leur permettant de relever efficacement les défis auxquels elles sont confrontées.  Dhaatri bénéficie du soutien de Both ENDS, membre de la Global Alliance for Green and Gender Action. 

Il s’agit d’une histoire parmi tant d’autres du réseau de la Global Alliance for Green and Gender Action (GAGGA), où les femmes, les filles, les personnes trans, intersexes et non binaires des communautés locales et autochtones sont en première ligne dans la lutte pour la justice climatique et environnementale contre les fausses solutions climatiques.  Il est temps de financer les solutions climatiques transformatrices mises en œuvre par les femmes, les filles, les personnes intersexes, non binaires et trans, puis de mettre un terme aux investissements dans de fausses solutions climatiques.  Engagez-vous à soutenir les droits de l’homme et à investir dans le leadership des femmes pour des solutions climatiques équitables en matière de genre !

GAGGA sera présent lors de la CSW68, du 11 au 22 mars 2024. Pour toute possibilité de collaboration et pour en savoir plus, veuillez contacter Noemi Grütter, co-coordinatrice et responsable de plaidoyer et collaborations de GAGGA : n.grutter@fondocentroamericano.org. Pour en savoir plus sur cet article ou sur le travail de Dhaatri (centre de ressources pour les femmes et les enfants) et les contacter directement, veuillez-vous adresser à Saraswat Mandarapu, coordinatrice médias, à l’adresse suivante : saraswat@dhaatri.org.

Cet article et les actions de GAGGA dans le cadre de la CSW68 sont soutenus par Affaires mondiales Canada et le ministère néerlandais des Affaires étrangères. Leurs contributions ont été déterminantes dans les efforts de GAGGA pour mettre en lumière les questions et les voix critiques lors de la CSW68.


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